ATYPIQUE

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CHARISME  
COLLATÉRAL  
LES ELECTIONS MUNICIPALES  
OSTENSIBLE ET OSTENTATOIRE  
TRANSCENDANT I  
TRANSCENDANT II  
 

UNE GRAPPE DE MOTS AUTOUR D'UNE DIFFICULTÉ

   
  ATYPIQUE
 

Supposons un apprenant embarrassé par ce mot

Ce mot rare et savant aurait très bien pu ne pas figurer parmi les 15000 mots du DFU. Il y est pourtant en deux endroits, signalés par la recherche alphabétique. L'article CARACTÈRE II 4 nous apprend qu'Ulla, qui est petite et brune, est une Scandinave ATYPIQUE, parce qu'elle n'est pas conforme au TYPE général, défini comme l'ensemble des caractères communs à un ensemble de plusieurs objets concrets ou abstraits, constituant une sorte de MODÈLE idéal. Le TYPE scandinave est défini dans l'exemple précédent qui concerne Olaf, grand et blond. L'article EXEMPLE II 1 nous apprend qu'un exemple est choisi parce qu'il est le TYPE d'une catégorie d'évènements, de personnes, d'idées ou d'objets dont il a les principaux CARACTÈRES. Il en est un exemple TYPIQUE (ant. ATYPIQUE). La recherche plein texte ignore atypique mais nous donne une attestation de TYPIQUE (article EXEMPLE II 1) : Pierre est un exemple typique de mauvais joueur : aux cartes, il éclate de joie quand il gagne et il renverse la table avec colère quand il perd.

En 2003 le corps médical s'inquiète de l'apparition d'une PNEUMOPATHIE ATYPIQUE parfois mortelle, qui se répand par contagion. Il ne lui connaît pas de NOM, n'arrive par à l'IDENTIFIER, ne sait pas comment la soigner. Le DFU ne connaît pas pneumopathie qui est un mot technique du vocabulaire médical. Mais il connaît les mots PNEU, PNEUMATIQUE, PNEUMOCOQUE, PNEUMOLOGUE, PNEUMONIE qui renvoient tous à l'article AIR où il est précisé que PNEUMO- est une base savante d'origine grecque servant à former des mots exprimant l'idée de "respiration". Et il connaît les mots PATHOGENE qui renvoie à VIVRE et PATHOLOGIQUE qui renvoie à l'article MALADE, MÉDECIN ET SANTÉ. Il n'est pas difficile de deviner que le malade atteint de pneumopathie souffre de troubles de la respiration.

Cette PNEUMOPATHIE est ATYPIQUE parce qu'elle ne RESSEMBLE pas aux autres, ne présente pas les caractères des autres pneumopathies connues. L'article MALADE etc. précise que ces caractères s'appellent des SYMPTOMES ou SIGNES CLINIQUES.

On pourrait arrêter là la recherche, mais il peut être intéressant de la pousser un peu plus loin. La section II 4 de l'article CARACTÈRE nous fournit en outre les dérivés et composés TYPIQUEMENT, TYPOLOGIE, ARCHÉTYPE et la section III 1, le mot PROTOTYPE, que nous pouvons faire fonctionner et définir. Olaf est typiquement scandinave. Un prototype est un objet destiné à servir de modèle à d'autres qui seront fabriqués en série et un archétype le plus ancien exemplaire d'une série d'objets qui s'étale dans le temps. A l'intérieur d'un domaine donné, une typologie est l'étude des différents types d'objets qui s'y trouvent : types de langues, de maladies etc.

La section II 4 nous renvoie de plus aux mots CLASSER, MODÈLE et ORIGINAL Surfons à travers ces mots, en leur ajoutant éventuellement CATÉGORIE (qui nous renvoie à CLASSER), APPELER ET NOM, et IDENTIFIER. Dès la section I 1, l'article CLASSER nous apprend que ce verbe exprime l'exercice d'une activité fondamentale de l'esprit humain qui ne peut pas penser ce qui existe au monde sans DISTINGUER et NOMMER des objets donc sans les répartir en CATÉGORIES, selon leurs RESSEMBLANCES et leurs DIFFÉRENCES, deux mots qui nous amènent directement à COMPARER qui lui-même nous conduit vers l'article MEME ET AUTRE où nous retrouvons IDENTIFIER.

L'article APPELER ET NOM nous apprend que le nom d'une personne DISTINGUE celle qui le porte de toutes les autres son nom de famille dit ce qu'il a de commun avec le groupe familial, et le prénom ce qu'il a d'individuel. C'est ce qui apparaît sur sa carte d'IDENTITÉ

ORIGINAL nous mène à COMMUN qui nous ramène à CARACTÈRE et MODÈLE nous ramène à CARACTÈRE et à EXEMPLE.

De tout cela nous pouvons conclure que devant une maladie atypique, le premier travail des médecins est de l'IDENTIFIER : d'en regrouper les cas, et de comprendre en quoi leurs symptômes diffèrent de ceux d'autres maladies connues, en quoi ils leur ressemblent, et de donner un nom à cette catégorie de maladie. Après quoi le travail de recherche de la cause et des moyens de la guérir pourra utilement commencer.

  CHARISME
 

Voilà un mot savant, prononcé à la grecque, avec un /k/ initial, s'il vous plait ! un mot à la mode, qui, accompagné de son dérivé, l'adjectif charismatique, s'est répandu comme une trainée de poudre dans le vocabulaire français contemporain. Ses plus anciennes attestations, du moins dans un sens profane, ne remontent pas au-delà des années soixante. Avec une forte charge méliorative, il s'applique à toutes sortes de situations : Un "jeune cadre dynamique" qui, pendant ses loisirs, cultive le bel canto, écrit dans le journal de son entreprise : "Les cours de chant ont renforcé mon charisme". On a pu entendre à la radio que deux rivaux en politique, "Ségolène et Nicolas sont charismatiques, ils se coulent dans le peuple". Un professeur en retraite témoigne de son expérience : "En matière d'enseignement, je crois surtout au charisme. Le charisme fait 95 % du travail". On lit, dans un livre récent intitulé Dans le piège irakien que l'affreux dictateur Saddam Hussein avait - qui l'eût cru ? - "un charisme du geste. Il se faisait aimer et savait s'attirer la loyauté d'une minorité toujours apeurée." Qu'est-ce donc que le charisme ? un je-ne-sais-quoi, qui émane de celui ou celle qui en a, et qui lui donne, sur son entourage, une influence bénéfique, une autorité facilement acceptée.

D'où sort ce mot, et pourquoi ce succès ?

Il figure discrètement dans l'article TIRER (III,3) du DFU, en compagnie des mots MAGNÉTISME et ATTIRANCE. On peut le cerner davantage, de façon synchronique, en naviguant entre plusieurs articles de ce dictionnaire. : D'abord l'article ESPRIT, (sections I 1 et I 4) parce que de toute évidence, le charisme est de nature SPIRITUELLE et l'individu charismatique est INSPIRÉ. Et puis les articles DONNER (section II 8) et GRÂCE (section II) qui reposent sur la même structure à deux actants : un actant puissant et généreux qui librement, sans y être en rien obligé, et sans attendre de réciprocité, fait un DON, accorde une GRÂCE à un actant A2, sans aucun mérite de sa part. Normalement, A2, conquis par tant de bienveillance, bien loin de se sentir humilié, se réjouit et rend grâce à A1. L'individu charismatique a reçu son charisme de quelque puissance supérieure (le Ciel ? la Nature ? une bonne fée qui s'est penchée sur son berceau ?). Il n'y est pour rien, mais il en est plutôt fier, s'en réjouit et en profite pour agir.

Si maintenant nous voulons une explication historique, il va falloir faire un saut de plus deux millénaires dans le passé et rejoindre deux villes mères de notre civilisation, Athènes et Jérusalem.

 Nous voici parlant le grec des Athéniens de l'antiquité, où deux mots qui nous intéressent sont parfaitement usuels : un nom charis, la "grâce", dont la structure sémantique est la même que celle du mot français grâce, avec son acception physique et son acception psychique. Il y a dans la mythologie grecque trois Grâces, les charites, compagnes de Vénus, déesses personnifiant le don de plaire; et un verbe dérivé charizomai très employé depuis les origines, en prose comme en poésie, avec le double sens de "accorder une faveur, une grâce, faire plaisir" et de "pardonner, faire grâce". Mais d'un dérivé charisma pas de nouvelles.

Pour commencer à l'entendre, il faut nous transporter à Jérusalem, au lendemain de la Pentecôte racontée dans les Actes des Apôtres (II, 4). On sait, en effet, qu'à la suite des conquêtes d'Alexandre, le grec d'Athènes un peu simplifié, sous le nom de koinè ou "langue commune", s'était répandu dans tout le bassin oriental de la Méditerranée où il servait de langue véhiculaire.

Imaginons un peu dans quel état mental pouvaient se trouver les apôtres au sortir du Cénacle, où ils avaient reçu le Saint Esprit sous forme de langues de feu et de vent violent, quand ils se sont aperçus que la foule des étrangers accourus pour la fête comprenaient leurs discours chacun dans sa langue particulière, quand ils ont constaté qu'ils faisaient des miracles, qu'il leur suffisait d'imposer les mains à des fidèles (Actes XIX, 6) pour que le Saint Esprit "tombe" sur eux et qu'ils se mettent à prophétiser ! Il n'y avait pas de mot, dans aucune langue, pour dire de quoi il s'agissait, et c'est alors qu'ils ont dérivé du verbe charizomai le nom d'action charisma, généralement employé sous sa forme plurielle charismata.

Ces phénomènes extraordinaires étaient des grâces, des dons gratuits que leur faisait Dieu. Le mot charisma n'existe pas avant le Nouveau Testament. Il est particulièrement fréquent chez St Paul qui est le véritable inventeur du sens précis qu'il a retrouvé aujourd'hui dans le langage religieux. Un exemple suffit, tiré de la Première épître aux Corinthiens (XII, 4 - 10) où il est traduit dans les versions un peu anciennes de la Bible par le mot DON : « Il y a certes, diversité de charismes spirituels, mais c'est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c'est le même Seigneur, diversité d'opérations, mais c'est le même Dieu qui opère toutes choses en tous. A chacun la manifestation de l'Esprit est donnée en vue du bien commun. A l'un c'est un discours de sagesse qui est donné par l'Esprit, à tel autre un discours de science selon le même Esprit, à un autre la foi, dans le même Esprit, à tel autre les charismes de guérison dans l'unique Esprit, à tel autre la puissance d'opérer des miracles ; à tel autre la prophétie, à tel autre le discernement des esprits ; à un autre les diversités de langues, à tel autre le charisme de les interpréter. Mais tout cela, c'est l'unique Esprit qui l'opère, distribuant ses charismes à chacun en particulier comme il veut ». Proche voisin du mot charisme, le mot eucharistia "action de grâce", en français EUCHARISTIE, servit à dénommer le renouvellement rituel de la dernière Cène du Seigneur.

Les Pères de l 'Église emploient le mot charisma dans des contextes où il s'agit de gérer ces faits extraordinaires et de discerner les vrais et faux prophètes, les vrais et faux thaumaturges. St Jean Chrysostome affirme avec force que les charismes ne sont pas un privilège de la hiérarchie ecclésiastique et des moines, et que chaque baptisé a reçu un don particulier de l'Esprit. Mais, après le IIIe s., on constate que les charismes extraordinaires se raréfient. Non que le Saint Esprit ait abandonné l'Église, mais il se manifeste plus discrètement, de façon moins spectaculaire.

Et, tandis que le mot eucharistie connaît la fortune que l'on sait, le mot charisme s'endort dans une sorte d'oubli jusqu'au jour de la fin du XIXe s. où il se réveille en fanfare aux Etats-Unis d'Amérique, au sein de la branche du protestantisme appelée MÉTHODISTE, elle même dérivée de l'ANGLICANISME. Les méthodistes connaissaient bien cette parole de l'Évangile de Luc (XI, 13) : "Si donc vous, tout mauvais que vous soyez, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père, celui du ciel, donnera-t-il l'Esprit saint à tous ceux qui l'en prient ". Mais ils n'ont pas été peu surpris, quand, certains d'entre eux l'ayant prise au pied de la lettre, et ayant demandé à Dieu de renouveler pour eux les charismes des anciens temps, ils les ont entendus pratiquer la GLOSSOLALIE, autrement dit proférer des paroles en une langue étrangère à toute autre langue humaine, raconter leurs visions, parler d'un "baptême dans l'esprit" superposé au baptême sacramentel, et quand des malades auxquels ils imposaient les mains se déclaraient guéris. Bref, il en est résulté, sous le nom de PENTECÔTISME, une nouvelle scission, et de grandes assemblées qui, vers la fin des années soixante attirèrent l'attention de catholiques. Ceux-ci, à leur exemple, introduisirent dans l'Église ce qu'on a appelé le RENOUVEAU CHARISMATIQUE, bien accueilli, mais discipliné, par les papes Paul VI et Jean-Paul II.

Cet épisode de l'histoire ecclésiastique ne suffit pas à expliquer le succès qu'ont fait aux mots charisme et charismatique des gens qui, pour la plupart, ne mettent jamais le pied à la messe et encore bien moins dans une assemblée pentecôtiste, et pourquoi ils ne se contentent plus du mot don jusque là employé : "A1 a le don de se faire obéir, il a un don pour la musique"... En fait, le Renouveau charismatique dans l'Église consonne avec une tendance assez générale dans la société d'aujourd'hui à valoriser, à la manière du New Age, une pensée intuitive, non verbale, aux dépens du raisonnement analytique, à préférer les grandes représentations mystiques et spirituelles des religions orientales à une théologie raisonnante, et à dévaloriser le travail. L'affirmation moliéresque que "les gens de qualité savent tout sans avoir jamais rien appris" ne serait-elle pas un peu charismatique avant la lettre ? Au cours d'une émission de radio sur la Guerre des Gaules on a entendu l'historien interrogé dire que Vercingétorix était "un chef charismatique " parce qu'il avait réussi à faire l'unité des Gaulois habituellement divisés et qu'il savait les entrainer dans de grandes attaques. N'empêche qu'il a été battu par César, homme politique ambitieux qui n'était peut-être pas charismatique mais qui était un bon stratège et qui pouvait s'appuyer sur des légions dont l'efficacité reposait sur un armement et une organisation rationnels et un entrainement rigoureux. Moralité, si nous avons un charisme, tant mieux ! profitons-en ! mais ne nous y fions pas trop.

  COLLATÉRAL
 

Supposons un apprenant embarrassé par ce mot

Ce mot rare et savant aurait très bien pu ne pas figurer parmi les 15000 mots du DFU. Il s'y trouve pourtant, dans l'une de ses acceptions. La recherche plein texte dans le cédérom ne donne rien, mais la recherche alphabétique nous amène à FAMILLE II, 7 où il est dit que pour un individu donné, ses cousins, ainsi que les personnes de la génération précédente (oncles et tantes) dont il ne descend pas en LIGNE DIRECTE sont des collatéraux. DIRECT pourrait nous amener à l'article DROIT ET GAUCHE et LIGNE fait l'objet d'un article entier. Nous aurons besoin de ces deux mots, qui apparaissent dans des articles nombreux et complexes, mais il est plus simple et plus rapide de commencer par décomposer COLLATÉRAL en deux éléments, sans nous occuper du redoublement de l'l, simple irrégularité orthographique comme il y en a tant en français :

1) CO- préfixe qu'on retrouve dans coaccusé, cohéritier, codétenu, coédition, coéquipier, colocataire qui exprime toujours l'idée que deux ou plusieurs choses sont ensemble, vont l'une avec l'autre, dans le même temps et pour le même objet.

2) LATÉRAL, adjectif dont l'apprenant a peut-être déjà une certaine connaissance passive, et sur lequel nous allons cliquer.

Les articles COIN et FACE apportent des emplois où latéral s'applique aux côtés d'un solide, mais le plus important pour nous ce sont ses apparitions dans l'article CÔTÉ où nous retrouvons les affaires de famille en III 3 (le côté paternel et le côté maternel ) Il y est trois fois en capitales et une fois en minuscules : Dans la partie I nous apprenons que le corps humain s'oriente selon trois AXES (mot défini dans l'article TOURNER comme une "ligne idéale") : un vertical médian, de haut en bas et deux horizontaux, l'axe avant - arrière et l'axe DROITE-GAUCHE qui est précisément l'axe LATÉRAL. La droite et la gauche sont symétriques, de chaque côté de l'axe médian qui fait donc figure d'axe principal. Nous apprenons aussi que certaines personnes, qui distinguent mal la droite de la gauche ont des problèmes de LATÉRALITÉ.

En III 1), il s'agit de rues latérales qui débouchent sur le côté d'une grande artère. C'est un cas du même genre dans l'unique exemple révélé par la recherche plein texte (article TRAIN I 3) où certains wagons de voyageurs sont divisés en compartiments débouchant sur un couloir latéral. Dans ces deux cas, il y a croisement de deux lignes, l'une tenue pour principale, l'autre pour latérale. En II 2, d'un canal latéral à une rivière, creusé parallèlement à elle. Un objet peut donc être latéral à un autre, autrement dit se trouver "à côté de lui".

Un coup d'œœil d'ensemble sur l'article CÔTÉ nous révèle que l'adjectif latéral s'associe très facilement à toutes sortes de préfixes : équilatéral, unilatéral, bilatéral, trilatéral, multilatéral. Pourquoi pas, donc co-latéral ? Si A1 se trouve à côté de A2, et ne s'y trouve pas par hasard, si on veut insister sur le fait qu'il y a un lien entre les deux, qu'ils forment un ensemble, on peut dire que A1 est collatéral à A2. Ainsi, dans une grande église, il y a une nef principale et des collatéraux, qui sont les bas-côtés.

La recherche sur collatéral nous amène donc à constituer une grappe de mots du domaine de la GÉOMETRIE.

Mais enfin, l'apprenant qui demande des explications n'aura sans doute pas rencontré ce mot dans des histoires de familles, d'architecture ou d'urbanisme, mais dans un contexte de guerre où il s'agit de dommages collatéraux causés par un bombardement qu'on supposait pourtant bien ciblé. Cela signifie simplement que des bombes sont tombées à côté de leur cible, ou que les effets de bombes tombées à l'endroit visé ont été destructeurs sur des zones situées à côté de cet endroit. Pourquoi donc ne pas dire tout simplement les choses de cette façon ?

Parce que l'emploi d'un vocabulaire savant et abstrait, donc neutre, dépourvu d'affectivité, constitue ce qu'on appelle un EUPHÉMISME (expression atténuée d'une chose dont l'expression directe aurait quelque chose de déplaisant). C'est une manière de s'excuser sans présenter d'excuses : « nous ne voulions pas ça, nous n'avons pas fait exprès, mais c'était inévitable, il faut le comprendre».

  LES ÉLECTIONS MUNICIPALES VUES À TRAVERS L'ÉTYMOLOGIE
 

Ce n'est pas d'hier qu'il y a des communes en France. Dès le XIe s. des associations de bourgeois prirent ce nom,  puis devinrent institutionnelles et s'appliquèrent à des villes affranchies  du joug féodal et organisées par leurs propres habitants. L'adjectif  communal suffit pendant des siècles pour qualifier les affaires de la commune. Mais des clercs , à partir du XVe s., traitant   d'histoire romaine , calquèrent l'adjectif municipal sur le latin municipalis "qui concerne  les affaires d'un municipe" , autrement dit, d'une ville annexée par Rome, où les citoyens jouissaient des droits politiques locaux et des droit civils romains"

Cédant à la mode de l'antiquité, et pour faire "savant", les idéologues du XVIIIe s. s' emparèrent de municipal et lui donnèrent un dérivé municipalité qui, bien sûr, dit autre chose que communauté. Ils ne connaissaient pas l'étymologie moderne et ignoraient que les deux mots , commune et municipal reposent sur la même racine indo-européenne *mei- "changer, échanger", d'où "partager" et sur les mêmes très vieux mots latins munis , adjectif signifiant "qui accomplit la charge qu'il a reçue en partage", et munia (nom neutre pluriel) regroupant les sens de "charge, fonction officielle,   présent que l'on fait à ses concitoyens" (et non présent que l'on en reçoit), par exemple représentation théâtrale, jeux, combats de gladiateurs  d'où munificentia qui a donné en français munificence En latin, l'adjectif communis signifiant à l'origine "qui partage les charges" donc "collectif, commun" s'oppose à la fois à proprius"privé, particulier" et à immunis "exempt de charges" auquel se rattache le français immunité.

Quant aux élections  elles nous emmènent dans la famille du verbe legere "cueillir choisir, rassembler" d'où eligere "élire" . Tout le vocabulaire de l' élection existait  déjà dans le latin de la République romaine. Il s'agit de choisir, dans la masse du peuple  et de rassembler dans un même conseil municipal  une certain nombre d' élus  dont on peut espérer qu'ils constitureront une élite ; pour s'occuper des affaires de la commune. On voit donc qu'en l'occurrence, l'étymologie rappelle aux élus leurs devoirs et constitue une leçon de civisme.

  OSTENSIBLE ET OSTENTATOIRE
 

Ces deux adjectifs et leurs dérivés se trouvent dans l'article MONTRER III 9 du DFU, où l'on relève ceci : « Alice participe OSTENSIBLEMENT à des œuvres humanitaires avec l'intention VANITEUSE d'en mettre plein la VUE aux autres, ou la volonté de les DÉFIER, d'être pour eux un reproche vivant. Son dévouement est OSTENSIBLE. C'est de l'OSTENTATION. Elle agit de façon OSTENTATOIRE. C'est une "M'as-tu VUE".
Religion catholique : On fait l' OSTENSION du Saint Sacrement dans un OSTENSOIR, pièce d'orfèvrerie ornée de rayons, au centre de laquelle est placée l'hostie offerte à la VUE des fidèles. » Qui n'a pas en mémoire le vers de Baudelaire Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir ?

Dans l'article FIER, « A1 se met en AVANT, met en VALEUR sa propre personne, ses qualités, ses actions, ce qu'il possède, de façon EXCESSIVE et INDISCRETE, pour se faire ADMIRER. C'est de l'OSTENTATION. Il les ÉTALE de façon OSTENTATOIRE. Il en fait ÉTALAGE, il en fait PARADE devant les autres. »

En activant la recherche plein texte, on trouve dans l'article RICHE ET PAUVRE : « A1 humain vit dans le luxe. Il fait de grosses dépenses, des dépenses SOMPTUAIRES pour se procurer un extrême bien-être et pour s'entourer d'objets d'une beauté OSTENTATOIRE, pour vivre dans un cadre SOMPTUEUX, magnifique. Lucie aime descendre dans des hôtels de luxe. »

Dans le Dictionnaire Etymologique du Français de J. Picoche, ces mots occupent une petite place dans le vaste article TENIR qui regroupe tous les mots se rattachant à une racine indo-européenne ten- signifiant "tendre, étirer" et notamment au verbe latin tendere "tendre", à son dérivé ostendere "présenter, exposer" (participe passé ostensus) qui a lui-même une variante intensive en ostentare (participe passé ostentatus) "présenter avec insistance". Par exemple, c'est ce que font des manifestants qui, dans la rue tendent des banderoles écrites en gros caractères, tenues aux deux bouts par deux personnes de façon on ne peut plus OSTENSIBLE. Dira-t-on qu'ils la tiennent de façon OSTENTATOIRE ? Non ! En tous cas cela révèlerait une hostilité à l'égard des manifestants. OSTENTATOIRE est toujours péjoratif, dénonçant l'absence de cette discrétion, de cette modestie qui est la marque d'une bonne éducation. L'OSTENTATION est l' attitude d'un A1 humain qui attire l'attention de A2 humain sur un objet A3 avec une intention mauvaise. Tandis qu'OSTENSIBLE peut dire seulement que A1 attire l'attention de A2 sur A3 parce qu'il est important que A2 le voie. Par exemple, l'annonce d'un changement dans la signalisation routière peut être fait de façon très OSTENSIBLE, par des panneaux énormes, pour que les automobilistes ne se trompent pas.

Il se peut aussi que A2 ressente comme OSTENSIBLE ou même OSTENTATOIRE et se sente agressé par un A3 que A1 ne cache pas, rend bien visible sans intention particulière. Affaire d'éducation et de culture de la part de l'un et de l'autre.

Une certaine loi du 15 mars 2004 proscrit les signes religieux OSTENSIBLES à l'école, dans la louable intention d'éviter des guérillas de religion entre élèves, nuisibles à la sérénité des études. Elle ne dit pas OSTENTATOIRE, ce qui aurait constitué un procès d'intention à l'égard des porteurs des dits signes. La loi sanctionne des faits. Elle ne cherche pas, en principe, à sonder les reins et les cœurs. Elle ne dit pas non plus VISIBLES, comme l'auraient souhaité certains députés. L'adjectif retenu, OSTENSIBLE, permet une certaine souplesse d'application et la tolérance de ce qui est DISCRET. Par voie de conséquence, il contient aussi en germe toutes sortes de contestations avant l'établissement d'une bonne jurisprudence.

  S'INGÉRER
 

Supposons un apprenant embarrassé par ce mot

Faisons, pour une fois, un peu d'étymologie. Il existe en français un verbe GÉRER et plusieurs verbes terminés en - gérer. On pourrait les trouver par une recherche simple dans le cédérom en tapant *gérer. Mais vous obtiendriez l'indication de 23 articles et comme, dans ce cas, la machine ne vous amènerait pas directement sur le mot cherché, ce serait un jeu de patience d'y chercher les verbes en question. Il est plus simple d'ouvrir à l'article GESTE le Dictionnaire Etymologique du Français de Jacqueline Picoche (collection des Usuels du Robert) où l'on trouve regroupés GÉRER, DIGÉRER, INGÉRER, SUGGÉRER, et BELLIGÉRANT. Quoiqu'on puisse les considérer tous comme plus ou moins usuels, ce sont des mots "savants" parce que calqués sur le latin, où existe un verbe gerere qui signifie "Prendre sur soi", "Accomplir volontairement une tâche". Laissons de côté ingérer et digérer un aliment, avec leurs dérivés INGESTION et DIGESTION dont le sens, par trop disjoint, n'a plus rien à voir qu'avec le tube digestif. Les autres : gérer, qui se trouve dans le DFU sous DIRIGER avec le sens d'"utiliser des moyens de façon rationnelle", suggérer qui se trouve sous CONSEIL et sous DEMANDER avec le sens "d'influencer discrètement" une personne qui a à prendre une décision, lui demander un service sans insister. belligérant, dans l'article GUERRE désigne les personnes qui mènent la guerre les unes contre les autres. Dans ces trois cas, il s'agit d'une action à accomplir ou en cours d'accomplissement. Le verbe pronominal s'ingérer présente avec gérer et suggérer dont les dérivés nominaux sont GESTION et SUGGESTION, une différence morphologique en ce que son dérivé nominal est INGÉRENCE. Mais au point de vue sémantique, il dit, comme les autres, que le sujet mène une action in- , dans ... Dans quoi, au juste ? Dans les affaires d'un état étranger souverain.
L'index du DFU nous renvoie d'ingérer et ingérence à ÉTAT III 1... et à MELER IV 3.

Sous ÉTAT III 1, partie intitulée La souveraineté de l'État, on lit : Un pouvoir est souverain s'il n'est soumis à aucun autre. Il jouit de la souveraineté... Pour tout État, un autre État est un État étranger dans les affaires duquel il n'a normalement pas le droit de s'ingérer, encore qu'à la fin du XXe s., le droit d'ingérence soit un objet de discussion.

Sous MÊLER IV 3, partie dont l'exemple-titre, d'un registre plutôt familier est Éric se mêle de ce qui ne le regarde pas, suivi de Mêle-toi de tes affaires ! De quoi je me mêle ? qui nous donne un synonyme plus académique : s'IMMISCER. Le synonyme s'ingérer est donné en fin de partie, avec la mention "domaine politique" et le commentaire : Un pays ou un groupe de pays réclame le droit d'ingérence, c'est-à-dire le droit de s'ingérer dans les affaires d'un autre pays et d'y intervenir militairement dans des situations où il estime que les droits de l'Homme sont bafoués et que les citoyens doivent être protégés contre les exactions du pouvoir local.

Il peut donc être intéressant de "surfer" à travers les articles AFFAIRE, POUVOIR, DROIT ET LOI.

Sous AFFAIRE, la partie III (qui nous même à CONCERNER, CHARGER et RESPONSABILITÉ) nous dit que Léa s'occupe de ses affaires, de ce qui la CONCERNE, est IMPORTANT pour elle. Une certaine tâche est son affaire parce qu'elle en est personnellement chargée. CHARGÉE ? par qui ? Par un supérieur hiérarchique, quelqu'un qui a le droit de lui en confier la RESPONSABILITÉ.

L'article POUVOIR définit le pouvoir politique comme une AUTORITÉ que donnent à une personne les LOIS de son pays sur ses sujets ou ses concitoyens. Cette personne l'exerce de plein DROIT sans avoir à demander d'autorisation. Autrement dit, dans une société, il faut que quelqu'un commande et que son autorité soit réglée par des lois ou des coutumes.

L'article DROIT ET LOI nous dit que le droit est l'ensemble des lois qui permettent, dans une certaine société, de régler les rapports et les conflits entre les hommes avec JUSTICE et qui s'imposent à tous les citoyens. Il nous apprend qu'il existe différentes conceptions du droit et qu'on peut discuter des sources du droit. Et que quand les lois sont violées, c'est un TRIBUNAL qui doit juger l'affaire.

Les nations n'ont pas attendu la fin du XXe s. pour s'ingérer militairement dans les affaires des autres. Le droit des gens de portée internationale a toujours reconnu comme juste une guerre défensive contre une attaque ennemie, tenue en principe pour injuste. Mais dans le cas présent, il s'agit de faire reconnaître comme juste une guerre offensive.

Cette leçon de vocabulaire devrait mener à demander au professeur d'histoire quelle autorité peut reconnaître, non à un citoyen, mais à un État, le droit d'en attaquer un autre, qui légifère en matière internationale, et comment fonctionne un "tribunal international".

  TRANSCENDANT I
 

Supposons un apprenant embarrassé par ce mot

La recherche alphabétique nous révèle, à côté de l'adjectif transcendant un verbe TRANSCENDER dont l'adjectif est évidemment, au point de vue morphologique, le participe présent. Il est clair, également que ce verbe comporte, comme beaucoup d'autres le préfixe trans. La liste alphabétique sur laquelle nous l'avons trouvé nous fournit transcrire, transférer, transfigurer, transformer, transfuser, transgresser, transhumer, transiter, transmettre, transparaître, transplanter, transporter, transposer ainsi que les adjectifs transalpin et transatlantique, qui tous expriment le passage d'un lieu à un autre ou d'un état à un autre. L'ennui est qu'il n'existe pas de verbe *scender. (Plusieurs des verbes de la liste sont dans le même cas, et il pourra être intéressant de les faire repérer aux élèves). Nous allons donc essayer, sur notre cédérom, une "recherche simple". Si nous plaçons entre deux astérisques la suite de caractères *cend * le moteur de recherche nous fournit 87 réponses ; avec *scend *, 62. Ne nous perdons pas dans ce dédale et cliquons sur le seul et unique titre d'article où apparaît la base scend qui est MONTER ET DESCENDRE. Nous apprenons dès le début de l'article qu'il existe une base savante ASCENS- qui sert à former des mots exprimant l'idée de MONTER. Nous la trouvons, en effet, dans ASCENSEUR, ASCENSION. Il n'existe pas en français de verbe *ASCENDRE, mais si nous avons quelques souvenirs de latin nous savons que dans cette langue qui est la mère de la nôtre, ascendere et descendere s'opposent l'un à l'autre comme monter et descendre en français et que leur participe passé était formé sur une base - scens-. Pourquoi descendre et pas *descender ou bien transcender et pas *transcendre ? Parce que la terminaison de descendre est "populaire", ce verbe s'étant transmis de bouche à oreille au cours des siècles, alors que transcender est savant, directement calqué sur le latin transcendere qui signifiait "passer par-dessus". La recherche étymologique qui, pour les mots populaires n'a qu'un intérêt historique, peut être très utile pour comprendre la formation et la structure des mots savants.

Ouvrons maintenant les articles vers lesquels nos recherches sur cédérom nous ont guidés, et qui sont DIEU, HAUT ET BAS, MONTER ET DESCENDRE, ce dernier article nous renvoyant à FAMILLE, où se trouvent des DESCENDANTS qui descendent de leurs ASCENDANTS et constituent leur DESCENDANCE.

Les articles DIEU et HAUT ET BAS nous jettent d'emblée en pleine théologie : les panthéistes pensent que Dieu est IMMANENT au monde (qu'il est présent dans chacune de ses parties) alors que la Bible le présente comme transcendant. Il transcende le monde qu'il a créé mais dont il ne fait pas partie, il est le Très-Haut et il est situé symboliquement dans le Ciel.

Revenant sur Terre, nous trouvons un exemple où il est dit que la pianiste Lucie est transcendante : d'une valeur exceptionnelle, qu'elle est supérieure à tous les autres.
Nous savons donc déjà l'essentiel : le verbe transcender exprime le passage d'une état inférieur à un état supérieur et l'adjectif transcendant cet état supérieur.
Mais nous pouvons poursuivre la recherche avec d'autres outils, si nous les avons sous la main. Dans le Dictionnaire étymologique du français de Jacqueline Picoche (collection Les Usuels du Robert), toute la famille d'une racine indo-européenne *skand- est regroupée dans l'article ÉCHELLE et les mots en - scend- et en - scens- y occupent une bonne place. Si vous possédez le Dictionnaire historique de la langue française d'Alain Rey vous y verrez comment transcendant est passé de la théologie à la philosophie et aux mathématiques avant de tomber dans le langage courant.

Le verbe transcender a le vent en poupe. Relevé dans des articles de journaux : "Le problème des retraites n'est ni de gauche ni de droite mais national et transcende les générations" et cet exemple tiré de l'interview d'un jeune violoniste qui eut, avec son frère violoncelliste, le privilège de jouer avec une illustre pianiste : « En écoutant le disque je me dis : Mais comment a-t-on pu arriver à produire ces sons ? Elle nous a transcendés ». Les très grands artistes ont cette faculté de se transcender et de transcender les autres. Intéressant néologisme : A1 humain transcende A2 humain : il l'élève au-dessus de lui-même.

  TRANSCENDANT II
 

Supposons un apprenant embarrassé par ce mot

Le professeur guide ses élèves

A Ouvrez l'index.

Cherchez TRANSCENDANT - Il y est en compagnie de TRANSCENDER avec un renvoi à DIEU et à HAUT ET BAS

Voyez-vous dans cet index d'autres mots, en particulier d'autres verbes commençant par ce préfixe TRANS- ? Oui, beaucoup !

Relevez ceux qui se composent de trans - + un mot que vous connaissez. D'après le sens de ces mots, que signifie le préfixe TRANS ?

Le verbe TRANSCENDER fait partie des composés de trans- + une base que vous ne connaissez pas

Allez dans le moteur de recherche et inscrivez dans le rectangle *scend*
Quelle est la réponse ? renvoi à 62 articles ! Parmi ces 62 voyez-vous un titre d'article où apparaît la base scend ?

Oui, MONTER ET DESCENDRE - Nous nous contenterons de celui-là Inutile d'ouvrir les autres.

Ouvrons maintenant les articles DIEU et HAUT ET BAS - Le professeur s'assure que les élèves comprennent les exemples où apparaissent transcendant et transcender.
Ouvrons maintenant MONTER et DESCENDRE - Faire trouver DESCENDRE d'un ancêtre, remonter jusqu'à cet ancêtre et ouvrir FAMILLE ; Faire trouver les ASCENDANTS et les DESCENDANTS

Donc que signifie donc cette base SCEND ? Elle signifie "Monter".

Si vous voulez en savoir plus long sur cette base, ouvrez les Dictionnaire étymologique du français et cherchez TRANSCENDANT dans l'Index. Vous êtes renvoyés à l'article ECHELLE où tous les mots formés sur la base -scend- sont regroupés dans le § I E
Si vous voulez en savoir plus long sur les différents emplois de TRANSCENDANT, ouvrez le Petit Robert ou le Grand Robert ou le TLF ou le Dictionnaire Historique de la Langue Française d'Alain Rey et vous aurez de quoi causer pendant une bonne heure !

 

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